
Les rapides mangent les lents : le passage à la vitesse supérieure est donc une nécessité dans la bataille contre les scolytes. Pour aider à gagner la course, le Service national cartographique de Finlande a développé un système de spectrométrie par drone. Ce modèle d’intelligence artificielle utilise l’imagerie par drone pour identifier rapidement les arbres infestés par les scolytes. Plus l’infestation est détectée tôt, plus la propagation des dégâts peut être maîtrisée en abattant les arbres touchés.
LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE va provoquer la proliféra-tion des espèces de scolytes indigènes. L’insecte attaque générale-ment les épicéas affaiblis. Les facteurs de risque comprennent les dégâts causés par la neige et la sécheresse, ainsi que les arbres tombés suite à des vents violents. Si les populations sont consé-quentes, l’insecte peut également attaquer les arbres sains.
Le scolyte, ou Ips Typographus L pour être précis, a causé des dégâts forestiers massifs en Europe centrale et dans le sud de la Suède depuis près d’une décennie maintenant. L’université suédoise de sciences agricoles (SLU) estime que les dégâts causés par le scolyte européen de l’épicéa dans les années 2010, ont quadruplé par rapport aux années 2000. En 2020 et 2021, on estime que les scolytes ont causé huit millions de mètres cubes de dégâts en Suède.
Un drone intelligent avec imagerie spectrale
Un drone commandé à distance est amusant à piloter. Il peut également être un appareil de mesure intelligent lorsqu’il est équipé de caméras et d’une intelligence artificielle. Eija Honkavaara, enseignante-chercheuse du Service national cartographique de Finlande dirige le consortium de recherche ML4DRONE financé par l’Académie de Finlande. Ce consortium développe l’utilisation de drones pour limiter la propagation des dégâts forestiers et en particulier ceux causés par les scolytes qui tuent les épicéas. L’étude, menée par Eija Honkavaara, s’intéresse à la façon dont l’IA peut être utilisée pour détecter des dégâts le plus tôt possible. L’objectif est de cibler une attaque verte, pour détecter la menace d’une infestation de scolytes bien plus tôt qu’avec tout indicateur pouvant être observé par un œil humain.
« La caméra connectée au drone enregistre l’empreinte spectrale de la cible. Plus la caméra utilisée est sophistiquée, plus l’empreinte spec-trale sera précise. Comme les caméras hyperspectrales peuvent détecter plus de longueurs d’onde, elles peuvent également voir les changements sur les arbres de manière plus précise », explique Eija Honkavaara.
L’imagerie spectrale mesure le spectre de la lumière. Dans un prisme, les différentes longueurs d’onde de la lumière sont réfractées différem-ment et l’œil les perçoit comme des couleurs différentes. Une étude menée par Eija Honkavaara a révélé que des caméras hyperspectrales précises peuvent même détecter de légers changements dans la réponse spectrale des aiguilles à un stade précoce.
Dans la course contre les insectes, le temps, c’est de l’argent
Vert, jaune, rouge, gris. Eija Honkavaara montre une série de photos d’une forêt, dans le sud de la Finlande, prises par un drone intelligent. Les arbres à observer sont marqués. La photo aérienne globale com-mence par être verte. La photo suivante, prise environ deux semaines plus tard, a déjà une apparence différente. Le vert semble passer au jaune. Les scolytes mastiquent déjà depuis un certain temps.
La photo jaune est suivie d’une photo montrant du rouge. Environ 5 semaines plus tard, le rouge est passé au gris. Les arbres sont morts.
« Plus ces insectes nuisibles progressent, plus ils bloquent le flux des éléments nutritifs et des fluides dans le phloème. Parfois, la destruction s’effectue en quelques semaines seulement. Plus la population de sco-lytes est détectée tôt, plus la réduction des dégâts est donc efficace. »
La commercialisation progresse
Encore récemment, les moyens de détecter les scolytes restaient inchan-gés et exigeaient beaucoup de main-d’œuvre. Des personnes parcou-raient la forêt pour inspecter les troncs des épicéas. Rencontraient-ils des indices de petits trous, de sciure, peut-être de fuite de résine ? Que trouvaient-ils dans les pièges à phéromones ?
« Au cours des dernières années, les technologies ont progressé rapidement. En matière de drones, les Finlandais sont à la pointe de la technologie en Europe centrale. Des entreprises ont déjà commencé
à commercialiser ces technologies. Des solutions à venir seront plus autonomes. Un opérateur humain est devenu inutile. La surveillance est possible 24 heures sur 24, 365 jours par an. »
Texte: Sirkka-Liisa Aaltonen